

FORT D’UNE EXPÉRIENCE TRANSVERSALE DE QUASIMENT TOUTES LES FACETTES DU METIER, LE CHEF CORVEZ LIVRE SON POINT DE VUE SANS LANGUE DE BOIS SUR LE SIGNE DE QUALITE ET LA RESTAURATION AUJOURD’HUI.

Qu’apportent les Saveurs de l’Année à la restauration selon vous ?
Jean-Yves Corvez : Cette démarche a déjà le mérite de mettre en avant des produits auxquels les restaurateurs ne pensent pas spontanément. Elle sélectionne pour eux des produits courants qui peuvent leur être d'une grande utilité. Dans le palmarès de l'an dernier, j'en ai trouvé certains qui m'intéressent particulièrement. En plus, un tel signe peut permettre au restaurateur de gagner du temps en contribuant à une meilleure connaissance de l'offre. Il existe tellement de produits qu'il peut s'avérer fort utile d'être aidé dans ses choix. Au moins pour certains produits car nous devons également continuer à travailler avec des produits frais.

Vous n’êtes donc pas hostile aux produits transformés…
J-Y. C. : Il faut arrêter l'hypocrisie. Je ne connais pas un restaurateur qui ne travaille pas avec des produits de l'industrie. Nous avons beaucoup de gens à nourrir et tout le monde ne peut pas tout le temps faire son marché à l'ancienne. Il y a une demande à satisfaire et l'industrie alimentaire est maintenant capable de faire des produits de qualité. D'ailleurs, des chefs de très grande renommée travaillent avec elle. Mon souci est surtout que l'origine des produits initiaux soit de mieux en mieux garantie par une traçabilité exemplaire. Les produits agroalimentaires doivent être, bien sûr, élaborés avec des matières premières de qualité.

Quels sont les atouts de ces produits pour vous ?
J-Y. C. : Ces produits peuvent apporter un vrai service aux restaurateurs. Avec la hausse des charges, salariales notamment, ils peuvent, par exemple, nous permettre d'économiser sur un poste que nous ne jugeons pas essentiel. Ils offrent également un gain de surface et ont d'ailleurs influencé l'évolution de la conception de nos cuisines. Si un produit existe sur le marché en semi-élaboré, autant en profiter, car cela nous permettra de nous focaliser sur les savoir-faire qui nous tiennent vraiment à cœur.

Quels sont ces savoir-faire ?
J-Y. C. : Les chefs doivent malgré tout continuer à faire leur travail et rester créatifs ! Le rôle de l'industrie alimentaire n'est pas de leur dire ce qu'ils doivent faire. Par exemple, certains fonds de sauce déshydratés apportent un véritable avantage en matière d'hygiène ou de gain de temps. Par contre, les restaurateurs doivent continuer à apporter leur patte personnelle à leurs recettes. L'essentiel est de préserver l'équilibre entre ces deux notions. Nos métiers sont difficiles, il n'est donc pas interdit de se faciliter l'existence avec des produits meilleurs et moins chers. Par contre, il faut bien sûr veiller à ne pas uniformiser les goûts en jouant aux apprentis sorciers. Mais nous n'en sommes pas là heureusement, et une démarche comme les Saveurs de l'Année y contribue.

Peut-on résoudre ces contraintes sans diminuer la qualité ?
J-Y. C. : J'ai réalisé une émission avec France 2 qui s'appelle « Légitime dépense » et où je relève un défi : composer un repas gastronomique pour quatre personnes pour moins de 20 euros, tout compris. Et bien, cela est possible, avec des produits de l'agroalimentaire trouvés en grandes surfaces notamment, en choisissant les bons produits, en prenant le temps de lire les étiquettes. Cependant, j’ai aussi associé dans ce menu, des produits frais que j’ai achetés sur un marché de banlieue. En conclusion, on peut consommer en alternant ou en associant produits frais et produits de l’industrie agroalimentaire.
